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Pyrénéisme
Voyage thermal et climatique
Le tourisme pyrénéen apparaît dans les années 1830 et se développe réellement à partir de 1860.
Ce tourisme est avant tout thermal et climatique. En effet, des officiers anglais qui viennent faire des cures d’eau montagnarde font connaître les Pyrénées. Plus tard, un médecin écossais, Alexandre Taylor (1802-1879) vante les bienfaits du climat béarnais.
Avec l’arrivée concomitante des premières locomotives à Pau vers 1862, la région accueille très vite de nombreux malades de la France et de l’Europe entière.
Cette clientèle plutôt riche vient prendre les eaux aux Eaux-Chaudes ou aux Eaux-Bonnes et est accompagnée souvent d’amateurs de promenades dans les montagnes, dont certains deviendront même de véritables pyrénéistes !
Les Bouillé s’installent à Pau
En 1865, le comte Roger de Bouillé (1819-1906), né à Nevers, s’installe à Pau, au 33 rue de Bayard avec sa femme Léopoldine de Tryon-Montalembert.
Cette dernière, souffrante, vient en Béarn pour profiter du climat doux et sain, et surtout pour prendre les bains aux Eaux-Bonnes.
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Le couple est accompagné de leurs quatre enfants : Henri, Marie, Yseult et Jéhanne.
Le comte, dessinateur, explore la montagne ossaloise et croque ses paysages. Curieux de tout, il s’initie à la géologie, à la botanique, dessine et réalise plusieurs esquisses par jour.
Son activité montagnarde de 1865 à 1875 (date de la mort de sa femme) va lui permettre, d’année en année, de compléter ses connaissances sur la vallée d’Ossau. Très vite, il décide d’écrire un guide en direction du public, afin de faire partager son amour pour la montagne et plus précisément les Eaux-Bonnes, le Pic du Midi d’Ossau et les Eaux-Chaudes. Le comte écrit d’autres ouvrages sous le pseudonyme de Jam.
Marie et Yseult à l’assaut des sommets ossalois
En 1865, Marie et Yseult ont respectivement 13 et 11 ans quand leur père leur fait découvrir les Pyrénées béarnaises et plus particulièrement le massif de Gourette. Très vite, elles se découvrent une véritable passion pour ces excursions. Ces dernières sont cependant bien préparées par le comte, aidé par des guides locaux : Esterles, Soustrade, Casabonne.
Cependant les fillettes ne sont pas épargnées par la difficulté des randonnées. Aux durées s’ajoutent parfois la chaleur, les vents violents, les orages, les chutes de pierre ou encore les descentes en rappel.
Costume d'ascension
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La mode féminine dans les années 1860 est caractérisée par des jupes de très grands formats reposant sur des crinolines et des cerceaux ou encore des cages. Au cours de la décennie suivante, la traine remonte sur le postérieur à mesure que la robe s'ajuste au corps oubliant de fait la crinoline.
Rien de bien engageant pour l’ascension des pics pyrénéens. Les sœurs Bouillé s’émancipent de cette mode et donc se libèrent en revêtant une partie des habits traditionnels des femmes ossaloises : jupes longues qui pouvaient être rabattues au moyen de rubans sur un jupon plus court.
Une excursion de 21 heures mais un Pic bien mérité : le Gabizos !
Depuis la plaine, deux magnifiques montagnes captivent le regard : le pic de Ger et le petit Gabizos. Ce dernier massif s’élève à 2639 m. Son itinéraire est plutôt rude : pentes herbeuses, crêtes et ressauts aériens.
Le 29 août 1870, le comte de Bouillé, Marie et Yseult quittent les Eaux-Bonnes à deux heures du matin pour réaliser l’ascension du Gabizos. Pour cela, ils ont payé deux guides : Jean Soustrade et Casabonne. Ces derniers sont endurants et résistants pour porter le matériel : la pharmacie, la boite à herboriser, les boissons, la nourriture et parfois même les bâtons.
A l’époque, le coût d’un guide vaut le prix de deux chevaux, soit 6 francs.
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Le groupe entame un sentier très étroit, sous les nuages. Sous le coup de 13h, ils arrivent au pied du Gabizos. L’ascension de ce pic s’avère très compliquée : non seulement il faut grimper avec des robes dans des fissures pentues en s’aidant de ses mains, mais les roches demeurent très friables et glissantes. La tension est palpable et constante. Arrivés au sommet, les randonneurs sont surpris par l’étroitesse de la pointe.
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La descente débute vers 14h55. Les deux sœurs ôtent leurs chaussures pour palper plus facilement les roches avec les pieds. Très vite, le groupe se retrouve piégé par la nuit et la pluie violente.
Ils ne retrouvent leurs lits aux Eaux-Bonnes qu’après les 22 heures.
Le pyrénéisme féminin
Si Marie et Yseult après leurs mariages abandonnent les ascensions, ce n’est pas le cas de Jéhanne, la benjamine. Elle continue avec son père les excursions en montagne, même après son mariage en 1891. On la retrouve avec son père (80 ans) et son mari, vicomte de Soriac, en haut du pic de Bigorre.
D’autres femmes, comme les sœurs Bouillé, ont repoussé les limites de l’impossible dans un monde majoritairement masculin. Ces promeneuses, randonneuses et montagnardes sont les grandes oubliées du pyrénéisme !
Sources
Pau, acte de décès (5MI445-23).
Les premières féminines dans les Pyrénées : XIXe et XXe siècles, Nanou Saint-Lèbe (BIB UP102).
Les grands guides des Pyrénées, Antonin Nicol (BIB U7938).
Costumes des Pyrénées, Edouard Pingret (BIB FIG22).
Guide-album aux eaux des Pyrénées, Vallée d’Ossau par Abadie (BIB U1308/2).
Album JAM (BIB U4790).
Guide des Eaux-Bonnes et des Eaux-Chaudes, excursions à pied, Jam (BIB U1215).
Les costumes régionaux d’autrefois sous la direction de Caroline Brancq (BIB U8352).
