Architecture vernaculaire

2021

au XIXe siècle

En 2021, les lecteurs s'emparent des "Documents du mois".  Douze d'entre eux ont composé le comité de rédaction du site internet des Archives départementales. Ils ont rédigé les rubriques publiées mensuellement pour vous faire partager leurs recherches, leurs découvertes et leurs émotions. Découvrez chaque mois un nouveau rédacteur et son texte.

Bernard Tisné entame ses recherches sur le patrimoine de la commune de Claracq en tant que membre d'une association, le Club des Aînés Ruraux de Claracq. Il s'intéresse notamment à l'ancien presbytère de la commune. Il est amené à consulter les minutes notariales de maitre Guilhot, notaire à Bruges. Intéressé par un contrat où figure un cahier des charges pour la construction d'une bâtisse, il a l'idée d'utiliser ces informations comme base pour reconstituer la maison en question. De cette simulation, il tire des enseignements sur l'architecture d'une époque où la coutume s'impose pour réglementer la construction.

Il propose une transcription commentée et illustrée de ces documents permettant de se plonger dans l'architecture vernaculaire du XIXe siècle. Elle est accessible sur le site de la commune de Claracq, à la rubrique "À savoir".

Qu'est-ce que l'architecture vernaculaire?

Elle définit l’ensemble des maisons propre à un terroir.
Nous désignons plus couramment cet ensemble sous le vocable d’architecture traditionnelle. Dans le monde romain, l’adjectif « vernaculus » sous sa forme masculine (ou « vernacula » au féminin) qualifie un objet ou une personne qui est du cru.

Carte des pays

Cette architecture est identifiée au travers de l'appellation du micro pays auquel elle appartient :
Vic Bilh, Soule, Aspe, Soubestre... Mais la différence géographique ne peut se comprendre qu'en
regard d'un contexte socio-culturel et d'une période. La loi sur l'architecture du 3 janvier 1977 ne
manque pas de rappeler ce postulat de base dans son article premier " L'architecture est une
expression de la culture ".

La communauté adopte des conventions constructives qui lui sont spécifiques pour répondre à ses besoins, à ses exigences et aux fonctions de ses activités économiques. Le repère chronologique des siècles est souvent pris en considération mais la période peut être réduite ou étendue à une mouvance stylistique plus ou moins longue. Pour faire simple, en Béarn d’une part le monde des laboureurs est dominant dans les terroirs de piémont et de coteaux, d’autre part la majorité des maisons "anciennes" ne remontent guère au delà du XVIIIe siècle et changent leur mode constructif avec l’ère industrielle.

Le presbytère de Claracq

Reconstitution d'une façade du presbytère de Claracq

Édifié au début du XIXe siècle, le presbytère hérite des matériaux puisés dans son environnement : galets, bois de charpente, sable de rivière, pierres de carrière locale ; des décors qui font consensus : fronton, génoise, crépis d’encadrement ; des techniques constructives éprouvées : croupe ou croupeton en pignon selon son orientation exposée ou pas aux intempéries, mur de surcroît pour une meilleure habitabilité de l’étage sous rampant, adaptation des maçonneries à la pente naturelle du terrain, coyau pour mieux maîtriser l’eau de pluie. Il témoigne aussi du programme voulu : héberger le curé, peut-être aussi sa servante et accueillir occasionnellement un étranger de passage. Dans le village, témoin majeur de son époque, ce bâtiment vous livre tous ses secrets constructifs dans la brochure qui lui est consacrée.

Détail d'un linteau de la porte d'entrée

Cette construction est remarquable parce qu’elle a été édifiée selon les règles architecturales des maisons du Vic Bilh. Ces petites maisons de pays conservées dans leur état originel deviennent de plus en plus rares. Vous pouvez en découvrir ce qui en fait l’intérêt et la richesse patrimoniale au travers de ses proportions, de son adaptation au terrain naturel, de son emprise au sol, des distributions des pièces, de sa charpente, des détails constructifs, des matériaux mis en oeuvre. Ce bâtiment est d’autant plus remarquable qu’il s’accompagne encore de sa grange et de son poulailler. Bref un ensemble dont l’aspect esthétique ne laisse pas indifférent.

Définitions

Clauson : village clos par des remparts.

Labouradisse : pièce labourable.

Carrérot : ruelle, chemin étroit.

Sous l’Ancien Régime, le presbytère occupait une parcelle près de l’église (les ruines du presbytère et de sa grange ont été démolies lors de la réalisation du parking situé devant le cimetière). Dans l’enceinte du clauson, elle confrontait avec deux jardins, ceux des maisons de Labadie (probablement propriété de l'abbé laïque) et de Larqué, deux petites parcelles en lanière où se trouvait les maisonnettes de Moncoueit et de Roudget et donnait sur le carrérot de l’église. De l’autre côté de ce chemin, un tènement dit du curé était scindé en plusieurs parcelles : un potager, une prairie, un inculte (bosquet dans la partie la plus pentue du tènement) et une pièce labouradisse. Au début du XIXe siècle, la maison presbytérale sera reconstruite à l’emplacement que nous lui connaissons aujourd’hui sur la parcelle de la maison de Jean Lafargue dit Hauret.

Construction d'une maison à Bruges

Consulter le contrat (conservé dans les minutes notariales de Bruges - 3 E 6578) qui a servi à la reconstitution de la maison
Reconstitution de la distribution des pièces.

Le 12 décembre 1836, à Bruges, la veuve Jeanne Huzet qui a fait le projet de reconstruire sa maison, mandate un homme de confiance Jean Jupé pour mener à bien le chantier. Devant notaire, elle passe contrat dans lequel elle détaille le cahier des charges des travaux.

Y sont précisés les dimensions de l’ouvrage, les matériaux à utiliser, le prix de la maison, pas plus de 800 Fr et le délai du chantier fixé à 6 mois pour livrer un bâtiment hors d’eau. Y figurent également les modalités financière : échéances de paiement de l’acompte et du solde ainsi que la garantie hypothécaire consentie.

Reconstitution de la maison Huzet à partir de la minute notariale

Faute d’un document concernant directement le presbytère de Claracq daté de 1815, par rapprochement ce contrat revêt un intérêt certain pour mieux comprendre dans quel contexte la construction a pu se dérouler. Surtout il met en lumière de manière détaillée comment maître d’ouvrage et maître d’oeuvre s’accordaient sur l’artéfact architectural. Vous êtes invité à découvrir la transcription commentée et illustrée de la minute notariale conservée aux archives départementales des Pyrénées-Atlantiques cote 3 E 6578 notaire Guilhot.

Les minutes notariales

Les minutes notariales sont les originaux d’un acte passé devant un notaire qui en garantit l’authenticité.

De part leur diversité, elles constituent une source inestimable pour l'histoire sociale et économique, autant que pour les recherches généalogiques. On y trouve des testaments, des contrats de mariage, des inventaires après décès, des contrats de vente, des baux, des ventes, des donations...

Dans les Pyrénées, les minutes notariales des études sises en Pays basque sont numérisées et accessibles sur notre site internet (des minutes les plus anciennes au début du XXème siècle). Les minutes des études béarnaises sont consultables en salle de lecture à Pau.

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