Portrait d'une ville - 1

2021

Saint-Pée-sur-Nivelle à la veille de la Révolution

En 2021, les lecteurs s'emparent des "Documents du mois".  Douze d'entre eux ont composé le comité de rédaction du site internet des Archives départementales. Ils ont rédigé les rubriques publiées mensuellement pour vous faire partager leurs recherches, leurs découvertes et leurs émotions. Découvrez chaque mois un nouveau rédacteur et son texte.

André Lesca travaille au sein de l'association Culture Patrimoine Senpere et anime le patrimoine local. Il s'intéresse au particulier, à ce qui peut différer et surprendre dans l'histoire locale.

Au début du XVIIème siècle, Saint-Pée est connue sous le nom de Saint-Pée d'Ibarren paroisse dépendant du bailliage d'Ustaritz, lui même partie de la sénéchaussée des Lannes recouvrant les territoires des Landes, de Bayonne et du Labourd.

L'administration royale est le résultat d'un empilement de fonctions créées au cours des siècles au fur et à mesure que le royaume s'est agrandi gérant des territoires aux confins souvent mal définis.

Quant au Labourd, il bénéficie d'un statut particulier, il est gouverné par une assemblée autonome : le Biltzar. Dans le cadre de ce statut, les Basques s’efforcent d'équilibrer les exigences de la vie pastorale et la nécessité de sauvegarder leurs richesses forestières. Pâturages et forêts sont inséparables et représentent la plus grande partie des biens et des finances communales, dont  la superficie demeure énorme par rapport à la propriété individuelle.
Le Biltzar regroupe les Etcheco Jaun, « Sieurs de maison », ou en d’autres termes, les propriétaires fonciers. Plus connus dans la paroisse sous le nom de leur maison que sous celui de leur famille, ils faisaient suivre ce dernier dans tous les actes officiels, jusqu’à la Révolution, de la mention : « Sieur de.. ».
À Ustaritz siège le Biltzar du Labourd réunissant les représentants des Biltzar paroissiaux.
En 1718, Saint-Pée rassemble 2250 habitants dans environ 450 foyers.

La noblesse

Elle est représentée par le marquis Anne-Henri-Louis de Caupenne d'Amou, tout nouveau seigneur de Saint-Pée. Né en 1742, il vient de prendre la succession de son père Jean-Baptiste de Caupenne décédé le 27 février 1788.

C'est en 1659 que Louis XIV a érigé le domaine de Saint-Pée en marquisat et en 1692, le nouveau marquis a reçu, tant pour ses héritiers que pour lui, la charge de sous-gouverneur et lieutenant du roi à Bayonne, dans les pays de Lannes, Soule et Labourd. Anne-Henri-Louis de Caupenne est ainsi marquis d'Amou, seigneur de Saint-Pée, d'Arbonne, d'Arritsague ; de Pomarez, de Castetsarrasin, baron de Bonut et d'Arsague. Militaire, il a fait la guerre de sept ans et est devenu tour à tour, colonel du Languedoc-infanterie, du régiment de Bourbon, maréchal de camp et chevalier de Saint-Louis. À l'heure de la Révolution, il est lieutenant-gouverneur de Bayonne.

Le marquis possède toutes les propriétés qui font partie de la seigneurie de Saint-Pée : le château, les terres et la moitié des revenus de quatre moulins. Également, 83 maisons paient tribut au castel. La proportion est considérable (près d'une cinquième, semble-t-il). Le quartier d'Olha, par exemple, comprend 44 maisons dont la quote-part annuelle va de 61 à 2 livres, cinq ont des conditions spéciales : elles doivent des dons en nature, plus des prestations en main-d’œuvre, elles « sont tenues de venir ou envoyer ouvrer ou labourer, chacun d'eux annuellement six jours » .

Carte postale du château en ruine du marquis de Caupenne (collection Lesca)

Le clergé

Carte postale de l'intérieur de l'église (collection Lesca)

Le curé est Salvat Marithourry. Né à Jatxou en 1742, il a été curé de Saint-Jean-Pied-de Port, puis de Saint-Pée sur proposition de la maison noble de ce lieu le 7 juin 1785, avec comme vicaires Hiriart et Pierre Martin Duronea. Les registres nous indiquent la présence de l'abbé Martin Detcheverry et Doyharçabal.
Quant aux biens de la paroisse, ils sont gérés par la Fabrique. Celle-ci  décharge les prêtres de cette gestion et évite la confusion entre leurs biens personnels et ceux de la paroisse. Elle est le centre temporel de l'administration de l'église et le seul centre permanent des intérêts collectifs de la paroisse. Cette gestion est assurée par des marguilliers : paroissiens élus au suffrage universel ou désignés.

Le Biltzar représente le Tiers-État

Le Biltzar de chaque paroisse, composé des maîtres de maisons franches (c'est à dire ne dépendant pas d'une autre maison), est dirigé par le maire-abbé (baldarn-apeza). Il administre les affaires communales. Il se réunit le plus souvent le dimanche après la messe en des lieux nommés kapitaleku. Pour Saint-Pée, c'est au lieu dit Saldoubia.
La principale prérogative du Biltzar du Labourd est l'autonomie financière. Il lève non seulement de sa propre autorité les contributions nécessaires à son fonctionnement, mais il approuve ou négocie le montant de l'impôt perçu au profit du trésor royal. Une fois fixé le montant final, l'assemblée en décide à sa guise la répartition et le mode de recouvrement.
Le syndic général est chargé de l'exécution des décisions prises par le Biltzar. Sa responsabilité personnelle est engagée lors de retards de paiement des impôts royaux. Il arrive que certains de ces agents se retrouvent en prison, pour ne pas compromettre ou oblitérer l'indépendance financière de la province.
Le Biltzar a également une fonction militaire : il gère une milice de 1 000 hommes chargée de défendre la province.

Bibliographie

Selon Maïté Lafourcade, maître de conférence à l'Université de Pau, les maisons des nobles et des curés ne sont pas représentées dans cette instance, à l'exception des maisons nobles d'Urtubie et de Saint-Pée d'Ibarron.
Maîté Lafourcade précise par ailleurs que le représentant du Roi ne participe pas davantage au Biltzar, cette présence aurait été inutile, tous les débats ayant lieu en langue basque. L'intendant, cet agent zélé de la monarchie absolue, chercha désespérément un subdélégué pour le pays du Labourd sachant parler la langue basque ; mais aucun basque ne voulut accepter cette mission.

Découvrir la suite du texte d'A. Lesca, et le destin de Saint-Pée pendant la Révolution...

Faire l'histoire d'une commune

Faire l'histoire d'une commune est une entreprise complexe tant elle peut être multiple, les éléments architecturaux, politiques, économiques ou sociaux étant souvent profondément imbriqués. Les archives de la commune sont bien sûr une source essentielle. Les archives communales sont conservées en mairie ou déposées aux Archives départementales (notamment pour les communes de moins de 2000 habitants). Les archives de préfecture et sous-préfectures, également conservées en Archives départementales, sont complémentaires des archives communales (séries O et Z notamment). Il ne faut pas négliger les archives d'entreprises, associations ou personnalités locales.

De nombreuses publications ont été réalisées sur l'histoire locale. La première étape d'une telle démarche reste donc de consulter la bibliothèque ! Les Archives départementales des Pyrénées-Atlantiques mettent à votre disposition de nombreux ouvrages d'histoire locale, son catalogue est consultable en ligne sur e-archives (rubrique bibliothèque).

Pour la commune de Saint-Pée-sur-Nivelle, n'hésitez pas à consulter les publications de la revue Culture patrimoine Senpere en suivant ce lien : https://cultureetpatrimoinesenpere.fr/buruxkak/Buruxkak.html (site consulté le 21/05/2024)

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