Filles publiques, maisons closes

Le XIXème siècle

La prostitution au XIXème siècle

Le cadre législatif

En 1810, le Code pénal n’interdit pas la prostitution. L’arsenal législatif né de la Révolution a donné aux municipalités le droit de réglementer ou d’interdire les pratiques.

Dans le département, entre 1835 et 1901, sept communes réglementent la prostitution : Bayonne, Pau, Nay, Oloron-Sainte-Marie, Biarritz, Saint-Jean-de-Luz, et Ciboure. Les communes de tailles importantes, les villes garnisons, ou les villes de passage comme les ports sont les premières concernées par la prostitution.

Statistiques sur le nombre de prostituées (4M131)

Ces arrêtés municipaux témoignent du discours réglementariste en cours pendant tout le XIXème siècle. L’aspect moral, bien que présent, n’est pas l’unique intérêt à défendre dans cette question. Un impératif guide ces mesures, l’hygiène publique et la lutte contre la propagation des maladies, et pour cela, il faut surveiller et contenir. Ainsi, la visite médicale est la première étape du parcours d’une femme arrêtée pour prostitution, la première aussi pour être autorisée à se prostituer. La prostitution est perçue comme nécessaire, mais il faut créer des lieux clos pour la contrôler et la maintenir sous le regard de l’administration, notamment par le biais de la police des mœurs.
Le XIXème siècle distingue trois types de prostitution. Les rapports administratifs laissent poindre une échelle de reconnaissance entre ces différentes formes : plus elle est aisée à contrôler, plus elle est moralement excusée.

Les maisons de tolérance ou maisons closes.

Elles sont six dans les Basses-Pyrénées au XIXème siècle, trois se situent à Pau, trois à Bayonne, toutes tenues par des femmes. Cette forme de prostitution est la plus appréciable aux yeux des autorités, car les filles publiques y sont encadrées, et la surveillance de leur santé facilitée. Chaque mardi, les filles des maisons de tolérance font l’objet d’un examen médical. Celles reconnues malades sont envoyées à l’hôpital ou dans un dispensaire, à la charge de la tenancière de la maison.

Les filles soumises libres

Les filles soumises libres sont des prostituées exerçant officiellement cette profession en dehors des maisons de tolérance. Comme les femmes en maison de tolérance, elles sont soumises à l’inscription sur le registre de la mairie.

L'inscription

L’inscription est faite sur demande d’un agent de police constatant le racolage ou d’une femme souhaitant se livrer à la prostitution.

Dans ce premier cas, un avertissement est fait à la femme, puis une lettre aux parents si cela n’a pas été suffisant. On espère que les parents, risquant l’opprobe de leur famille, sauront convaincre leurs filles de rentrer dans le droit chemin. Cette étape permet de retrouver des documents relatifs à la prostitution dans de nombreux fonds de petites communes : la demande transite par le maire de la commune où la jeune fille est née.

L’inscription est demandée au maire, et prononcée par arrêté.

Lors de la notification officielle, la jeune fille reçoit un carnet sanitaire dans lequel chacune de ses visites médicales sera consignée et une carte comprenant son état civil et qu’elle présentera chaque contrôle policier.

L’inscription n’est donc valable que dans une commune, principe fustigé à la fin du XIXème siècle. Une fille malade, et ne pouvant donc en principe exercer sa profession, peut partir dans une autre ville. Pour éviter ces phénomènes, la seule arme des policiers, et non des moindres, est la surveillance des déplacements des prostituées reconduites au domicile parentale. Un passeport leur est accordé, qui consigne leurs lieux de passages.

Lettre accompagnant l'arrestation d'une prostituée (E dépôt Navarrenx 1 I 2)
Feuille de route d'une prostituée (E dépôt Navarrenx 1 I 2)

La prostitution clandestine

La prostitution clandestine est la plus vilipendée, celle dont l’expansion inquiète à la fin du siècle, et la plus difficile à définir pour l’administration. Cette dernière catégorie comprend aussi la prostitution de buvette, facilitée par la législation de 1880 sur les débits de boissons, responsable d’après les commissaires de police comme les maires, du développement d’une prostitution hors les cadres, et donc d’autant plus dangereuse. On observe dans de nombreux établissements un nombre de serveuses jugé bien supérieur au nombre nécessaire pour servir la clientèle. Or, l’enivrement par l’alcool et par le corps sont clairement séparés par la loi. Aux marges de ce cas, on devine dans le discours administratif les comportements féminins condamnés par la société, tolérés par la police des mœurs, surveillés, regardés avec étrangeté. Mais ils ne sont pas le cœur de la réglementation de la prostitution.

Face à cette figure sociale du XIXème siècle, repris dans l’imaginaire collectif par de nombreuses figures littéraires, l’administration entend intervenir sur le plan sanitaire, policier, et administratif pour protéger l’individu, et le collectif. Plus qu’un regard moral, c’est un enfermement public que met en place la réglementation locale pour les filles de joie du XIXème siècle.

Les maisons closes sont interdites en France par la loi du 13 avril 1946.

Les sources

Les archives communales et la série I (police, hygiène publique, justice)

La sous série 4 M (police)

La série U (justice)

Les termes sont nombreux pour évoquer la prostitution au cours des temps. Comme souvent, une recherche sur e-archives doit commencer par la réalisation d'une liste de termes à chercher : filles publiques, maison close, maison de tolérance, prostitution...

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