Haltes, les Basses-Pyrénées pendant la Première guerre mondiale

  • Espions

    Les temps de guerre sont propices à la circulation de rumeurs et à l’installation d’un climat de suspicion dans la population. Dès août 1914, le contrôle des ressortissants étrangers est renforcé. Un comportement inhabituel ou des déplacements trop fréquents peuvent être perçus comme de l’espionnage. Ces questions sont particulièrement sensibles dans les Basses-Pyrénées en raison de leur position frontalière avec l’Espagne, pays neutre.
    A cette même période, les autorités cherchent à maintenir l’ordre public en invitant les populations à ne pas se fier aux bruits colportés, souvent sans fondement, même si la méfiance et la surveillance sont de rigueur. De nombreuses enquêtes sur des personnes jugées suspectes sont réalisées suite à une dénonciation ou à une demande des autorités, dont finalement très peu débouchent sur des condamnations. Les cas avérés d’espionnage donnent en revanche lieu à des sanctions exemplaires.

    1M130 Dépêche télégraphique du préfet des Basses-Pyrénées au commissaire de police de Biarritz en communication au sous-préfet de Bayonne, relative à l'attitude suspecte d'étrangers installés à l'hôtel Bristol de Biarritz.

    3 Z 85 Lettre de dénonciation au commissaire sur les propos anti-patriotiques de l'épouse d'un Allemand, 14 septembre 1914.

    1M133 Lettre du commissaire spécial d'Hendaye au préfet relative à la condamnation de deux personnes pour intelligence avec l'ennemi, 1918.

    1M131 Lettre du gouverneur militaire de Paris au général commandant la 18e Région de Bordeaux relative à la surveillance de deux Polonais suspects, 1914.

    1M131 Suite de la lettre

    1M100 Demande de renfort pour la surveillance de l'École d'aviation de Pau, 13 décembre 1915.

    6M12 Fiche de renseignement sur une Allemande naturalisée, [1915].

  • Réfugiés

    L'occupation de la Belgique par les troupes allemandes, l'installation du front dans le Nord et l'Est de la France poussent par vagues successives des centaines de milliers de familles hors de leurs foyers. L'exil imposé par la peur ou par une décision de l'autorité militaire entraîne un élan de solidarité à l'égard de civils brutalement jetés sur les routes et qui sont surtout des personnes âgées, des femmes et des enfants. Il est nécessaire de leur offrir un refuge, de subvenir à leurs besoins vitaux, ce qui est fait par la mise en place d'une allocation journalière dès août 1914.

    Les Basses-Pyrénées accueillent quelques milliers de réfugiés que le préfet est chargé de répartir de préférence loin des centres urbains. Mais après le premier élan de solidarité, la lassitude se fait jour : difficultés de subsistance, suspicion vis-à-vis de ces étrangers qui ont pu vivre aux côtés des Allemands.

    Souscriptions pour les refugies a Bayonne, 30 avril 1917

  • Blessés

    Dès le mois d’août 1914, les autorités organisent l’accueil et la prise en charge des soldats blessés sur le front. Les hôpitaux ne comptent pas assez de lits : des écoles, des hôtels et même certaines demeures privées sont réquisitionnés ou mis à disposition par leurs propriétaires pour être transformés en hôpitaux. On en dénombre au total plus de 120 dans le département.

    Des établissements se spécialisent dans le traitement de certaines blessures et pathologies, dont celles infligées par les gaz, à Larressore, tandis qu’on prépare la réinsertion des mutilés dans des centres de rééducation.

    Toute la population est mise à contribution. Les organisations humanitaires et les bénévoles, dont de nombreuses femmes, secondent le personnel médical et contribuent à améliorer le quotidien des blessés.

    Arrivée des blessés en gare de Pau

  • Combattants

    Même loin du front, le département a accueilli de nombreux soldats : hommes de tous horizons en entraînement à l’école d’aviation de Pau, Sammies en permission après l’entrée en guerre des États-Unis (1917) ou tirailleurs sénégalais en cantonnement à partir de 1918.

    On se mobilise pour les loger. Les soldats américains basés à Bordeaux viennent lors de leurs permissions dans les hôtels de la côte basque, plus rarement chez l’habitant. Néanmoins, une certaine incompréhension demeure entre les civils et les soldats ayant subi les horreurs de la guerre.

    Tous les combattants ne sont pas accueillis avec le même enthousiasme. On ovationne les soldats américains, dont les moyens financiers font vivre la région. En leur honneur, on pavoise le 4 juillet, pour leur fête nationale. En revanche, les soldats issus des colonies sont regardés avec méfiance : on craint les troubles à l’ordre public.

    Venus d'ailleurs

    Venus d'ailleurs

    Incidents

    Troubles

  • Prisonniers

    Les prisonniers de guerre arrivent dans le département par le train. Le premier impératif est de trouver les lieux où les détenir. Le département comprend deux principaux dépôts de prisonniers :

     

    • A Pau, 300 détenus en moyenne. Déplacé à plusieurs reprises durant la guerre, le dépôt est toujours situé en périphérie de la ville, pour des raisons de sécurité, d’hygiène, et par crainte de voir s’installer des Allemands à proximité de chez soi.
    • A Saint-Jean-Pied-de-Port, la citadelle abrite uniquement des prisonniers blessés avant leur renvoi vers un dépôt de prisonniers traditionnel.

    Les prisonniers sont avant tout des travailleurs. Rémunérés, et repérés par leur uniforme où figurent les lettres PG, ils travaillent principalement dans les travaux publics, pour l’industrie et dans les champs. Ils réalisent notamment la ligne de tramway entre Pau et Sault-de-Navailles.

    Leurs conditions de vie et de travail sont encadrées afin de les protéger. On rationne leur alimentation sur les quantités distribuées aux soldats français. Au menu, viande quatre fois par semaine, un pain tous les deux jours, pommes de terre, carottes, choux, oignons et pois cassés. Les prisonniers font eux-mêmes leur cuisine. La Croix rouge leur fournit régulièrement des vêtements.

    Pourtant, leurs conditions de vie ne sont guère réjouissantes. En hiver 14, des fièvres déciment le camp de Pau.

    Bien sûr, la surveillance reste une préoccupation. Malgré le recours à la gendarmerie et à la garde civile, les évasions sont relativement nombreuses : la frontière avec l’Espagne neutre et la mer font alors figure d’eldorado.

    Basques et Béarnais se familiarisent avec cette présence de l’ennemi à quelques pas de chez eux. Lorsqu’en 1915 on envisage de remplacer les prisonniers allemands à Saint-Jean-Pied-de-Port par des disciplinaires, la population de la ville s’insurge. Elle a trouvé plus terribles ennemis au calme de la ville que l’ennemi héréditaire…

    1M114 Lettre du sous-préfet de Bayonne au préfet relative au placement des prisonniers des armées, 1914.

    1M114 Suite de la lettre

    1M114 Lettre du général Auger sur la mise à disposition de prisonniers pour servir de main d'œuvre à la minoterie Heïd, 17 mai 1915.

    1M115 Procès-verbal au sujet d’un ancien anarchiste propriétaire d'un bar ayant servi de l'alcool aux prisonniers allemands travaillant dans le village, 1915.

    1M114 Lettre au Préfet relative à la situation des prisonniers du dépôt de Pau, 1915.

    1M114 Lettre de la Croix-rouge allemande au comité de secours des prisonniers de guerre allemands dressant la liste des vêtements envoyés au camp de Pau, 27 avril 1917.

    1M115 Lettre d'un agent de police sur l'arrestation de deux prisonniers de guerre en fuite à Saint-Palais, 7 septembre 1917.

    1M115 Fiche signalétique de prisonniers de guerre allemands, s.d.

    1M115 Fiche signalétique de prisonniers de guerre allemands, s.d.

  • Travailleurs

    Le départ des hommes pour la guerre dépouille les industries, commerces ou exploitations agricoles de leur main-d’œuvre. Il faut contribuer à l’effort économique en sollicitant d’abord les personnes non mobilisables – hommes comme femmes – mais également en faisant venir d’ailleurs d’autres travailleurs.

    Dans les Basses-Pyrénées, la neutralité de l’Espagne voisine favorise, dès 1914, l’arrivée de travailleurs espagnols, notamment dans le secteur des travaux publics et du bâtiment. Plus tard, se joignent à eux les Portugais, les Indochinois ou Chinois, les Sénégalais et les Alsaciens-Lorrains, essentiellement dans le secteur agricole. L’accueil de cette nombreuse population hétérogène est strictement encadré : délivrance de laissez-passer, visites médicales, surveillance des rapports entre la population locale et les étrangers afin que la productivité se maintienne tout en sauvegardant la sécurité nationale et l’ordre public.

  • Revoir l'exposition

    Cette exposition est une adaptation de l'exposition Haltes, les Basses-Pyrénées terre d'accueil et de passage dans la Première guerre mondiale.

    Cette exposition a été présentée au Pôle d'archives de Bayonne et du Pays basque du 25 août au 24 octobre 2014, et à la salle des arches de l'Hôtel du département à Pau du 12 novembre 2014 au 23 janvier 2015.

     

     

    Haltes à l'hôtel du département (Pau)

    Haltes à l'hôtel du département (Pau)

    Haltes à l'hôtel du département (Pau)

    Haltes à l'hôtel du département (Pau)